Analyser nos réactions pour mieux nous préparer à la prochaine crise sanitaire

 

Editorial - E. Gentaz 

 

ANAE N° 166

 

Juillet 2020

     La crise sanitaire actuelle, avec une période de confinement plus ou moins stricte selon les pays, a eu, a et aura des conséquences possiblement très importantes dans la plupart des domaines (sanitaire, économique, social, psychologique, etc.). Ces effets font l’objet de nombreuses analyses de la part de chercheurs issus de champs disciplinaires complémentaires qui les proposent à la diffusion via des supports médiatiques divers (journaux, magazines, radio, télévision, chaîne YouTube, e-conférences, etc., cf. références). Leurs travaux sont bien évidemment nécessaires mais risquent de s’avérer non suffisants. En effet, compte tenu de leur forte couverture médiatique, et du souhait bien légitime de chacun de « passer enfin à autre chose », une de leurs limites est qu’en n’intégrant pas assez les synthèses des retours d’expériences des professionnels du terrain, ils ne constituent probablement pas une véritable préparation à une prochaine crise sanitaire, dénommée ici PPCS. 

     

     Ce travail de PPCS aurait à tout à gagner à s’appuyer sur une analyse critique approfondie des actions et des réactions des professionnels de l’enfance et de l’éducation. Ces derniers, souvent éloignés des médias ou institutions centralisées ont aussi toute légitimité et compétence pour identifier les pratiques éducatives, pédagogiques et numériques qui ont été les plus (ou les moins) efficaces et appropriées selon tel ou tel contexte, mais aussi pour les formaliser et les partager avec leurs pairs. Cette crise a engendré une réactivité et une créativité incroyables de la part des nombreux acteurs de terrain (cf. Padlet ANEA-revue), et il semble fondamental de les valoriser et les partager dès à présent afin d’éviter qu’elles soient oubliées.

 

     Ce travail de PPCS pourrait être structurel, régulier et surtout local de manière à ce que chaque institution ou organisation intègre ce travail dans son plan de formation continue dès que possible et au plus près du terrain et des acteurs. Pour répondre à ce type de besoin, les grandes conférences nationales ne me semblent pas adaptées, leur objectif étant davantage finalement de remplir plutôt une fonction de communication institutionnelle. La crise a en effet révélé que ce sont souvent les initiatives locales et décentralisées des acteurs qui ont permis la résilience de notre système.

 

     Ce travail de PPCS devrait devenir un objet de recherche en lui-même afin que les leviers favorisants ou non, les bonnes pratiques et les changements de comportements en cas de crise soient identifiés et mieux compris.

 

     En conclusion, il semble crucial que l’ensemble de la communauté des professionnels et des chercheurs de l’enfance et de l’éducation s’appuie sur ses compétences et ses connaissances nouvellement construites pour se préparer à la prochaine crise sanitaire.

 

     En attendant, je vous souhaite un bel été.

 

Pr édouard Gentaz
Professeur de psychologie du développement à l’Université de Genève et
Directeur de recherche au CNRS

 

Références

Émission spéciale-RTS (2020). Les Effets du confinement. https://www.rts.ch/play/tv/dans-la-tete-de/video/emission-speciale--les-effets-du-confinement?id=11235177   

 

E-conférences (2020). Confiné-es : pour le meilleur et pour le pire. https://www.unige.ch/public/carrousel/cycle-de-e-conferences/

 

Mallet, P. (2020). La Vie d’élève confiné à la maison : quels effets en attendre sur les apprentissages scolaires et sociaux ? Un exercice de prospective. A.N.A.E. pratique, 001-006. https://fr.calameo.com/anae-revue/books/00617575913739088d320 https://anae-revue.padlet.org/anae/1

 

Padlet ANEA-revue (2020). COVID-19 - Mutualisation de ressources francophones pour les familles, les enseignants, les professionnels en temps de confinement. https://anae-revue.padlet.org/anae/1